vieilleries

by Gabriel Kröger

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1.
Ma tête est un boulet pour les gens à qui je m'enchaîne Et pour les faire couler c'est vers moi que je les entraîne Au bas de la pente je peux rouler, les soucis moi je les enterre Comme des cailloux dans mes souliers, je ne sais qu'en plaisanter Ma fièvre tombe Ma tête aussi Mon torse bombe Marteau-poitrine Ma fièvre tombe Ma tête aussi Mon torse bombe Marteau-poitrine Ma tête est un boulet pour les gens à qui je m'enchaîne Et pour les faire couler c'est vers moi que je les entraîne Au bas de la pente je peux rouler, les soucis moi je les enterre Comme des cailloux dans mes souliers, je ne sais qu'en plaisanter
2.
Un ange passe Et viens s'assoir sur mes jambes Les rendant lourdes Et tous les regards étranges Un ange passe Et j'angoisse Tout est si doux et si dur Et je m'enfonce dans les murs Un ange passe Et j'angoisse Son visage de poupon déformé Par la haine et l'anxiété Je n'ai plus Rien à revêtir Qu'une apparente froideur Sous les vapeurs mes cannes fondent Et la pâleur sur mon front Un ange passe Et j'angoisse Et j'angoisse Et j'angoisse Et j'angoisse Et j'angoisse Et j'angoisse Et j'angoisse
3.
4.
En ce temps-là j'étais en mon adolescence J'avais à peine seize ans et je ne me souvenais déjà plus de mon enfance Car mon adolescence était si ardente et si folle Que mon coeur tour à tour brûlait comme le temple d'Éphèse Ou comme la Place Rouge de Moscou quand le soleil se couche Et j'étais déjà si mauvais poète Que je ne savais pas aller jusqu'au bout Puis, tout à coup, les pigeons du Saint-Esprit s'envolaient sur la place Et mes mains s'envolaient aussi avec des bruissements d'albatros Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ? Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ? Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ? Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ? Pourtant, j'étais fort mauvais poète Je ne savais pas aller jusqu'au bout Et j'aurais voulu broyer tous les os Et arracher toutes les langues Et liquéfier tous ces grands corps étranges et nus sous les vêtements qui m'affolent Et le soleil était une mauvaise plaie Qui s'ouvrait comme un brasier En ce temps-là j'étais en mon adolescence J'avais à peine seize ans et je ne me souvenais déjà plus de ma naissance En Sibérie tonnait le canon, c'était la guerre Et les eaux limoneuses de l'Amour charriaient des millions de charognes Dans toutes les gares je voyais partir tous les derniers trains Et les soldats qui s'en allaient auraient bien voulu rester Dis, Blaise (Or, un vendredi matin) Sommes-nous bien loin de Montmartre ? (ce fut enfin mon tour) Dis, Blaise (On était en décembre) Sommes-nous bien loin de Montmartre ? (Je m’en souviens) Dis, Blaise (J'étais très heureux, insouciant) Sommes-nous bien loin de Montmartre ? (Je croyais jouer au brigand) Dis, Blaise (Et pourtant, et pourtant) Sommes-nous bien loin de Montmartre ? (J'étais triste comme un enfant) Je suis couché dans un plaid Bariolé Comme ma vie Et ma vie ne me tient pas plus chaud que ce châle écossais Et l'Europe toute entière aperçue au coupe-vent d'un express à toute vapeur N'est pas plus riche que ma vie Ma pauvre vie Ce châle effiloché sur des coffres remplis d'or Avec lesquels je roule Que je rêve Que je fume Et la seule flamme de l'univers Est une pauvre pensée Du fond de mon cœur des larmes me viennent Si je pense à ma maîtresse Pâle, immaculée au fond d'un bordel Elle ne sourit pas et ne pleure jamais Mais au fond de ses yeux, quand elle vous y laisse boire Tremble un doux Lys d'argent, la fleur du poète Ma pauvre amie est si esseulée Elle est toute nue, n'a pas de corps Elle est trop pauvre Et cette nuit est pareille à cent mille autres Quand un train file dans la nuit Et que l'homme et la femme Même jeunes, s'amusent à faire l'amour Je suis en route J'ai toujours été en route Le train fait un saut périlleux et retombe sur toutes ses roues Le train retombe sur ses roues Le train retombe toujours sur toutes ses roues Paris a disparu et son énorme flambée Il n'y a plus que les cendres continues La pluie qui tombe La tourbe qui se gonfle La Sibérie qui tourne Les lourdes nappes de neige qui remontent Et le grelot de la folie qui grelotte comme un dernier désir dans l'air bleui Le train palpite au cœur des horizons plombés Et ton chagrin ricane Les inquiétudes Oublie les inquiétudes Toutes les gares lézardés obliques sur la route Les files télégraphiques auxquelles elles pendent Les poteaux grimaçant qui gesticulent et les étranglent Le monde s'étire s'allonge et se retire comme un accordéon qu'une main sadique tourmente Dans les déchirures du ciel les locomotives en folie s'enfuient Et dans les trous Les roues vertigineuses, les bouches, les voies Et les chiens du malheur qui aboient à nos trousses Les démons sont déchaînés Ferrailles Chocs Rebondissements Nous sommes un orage sous le crâne d'un sourd Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ? Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ? Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ? Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre ? Non mais Fiche-moi la paix Laisse-moi tranquille Tu as les hanches angulaires Ton ventre est aigre et tu as la chaude-pisse C'est tout ce que Paris a mis dans ton giron C'est aussi un peu d'âme Car tu es malheureuse J'ai pitié j'ai pitié viens vers moi sur mon cœur Les roues sont les moulins à vent d'un pays de Cocagne Et les moulins à vent sont les béquilles qu'un mendiant fait tournoyer Nous sommes les culs-de-jatte de l'espace Nous roulons sur nos quatre plaies On nous a rogné les ailes Les ailes de nos sept péchés Et au bout du voyage c'est terrible d'être un homme avec une femme Il y a des trains qui ne se rencontrent jamais D'autres se perdent en route Car je suis encore fort mauvais poète Car l'univers me déborde Car je ne sais pas aller jusqu'au bout Et j'ai peur J'ai vu J'ai vu les trains silencieux les trains noirs qui revenaient de l'Extrême-Orient et qui passaient en fantôme Et mon œil, comme le fanal d'arrière, court encore derrière ses trains À Talga 100 000 blessés agonisaient faute de soins J'ai visité les hôpitaux de Krasnoïarsk Et à Khilok nous avons croisé un long convoi de soldats fous J'ai vu dans les lazarets les plaies béantes les blessures qui saignaient à pleines orgues Et les membres amputés dansaient autour ou s'envolaient dans l'air rauque L'incendie était sur toutes les faces dans tous les cœurs Des doigts idiots tambourinaient sur toutes les vitres Et sous la pression de la peur les regards crevaient comme des abcès Dans toutes les gares on brûlait tous les wagons Et j'ai vu J'ai vu des trains de soixante locomotives qui s'enfuyaient à toute vapeur pourchassés par les horizons en rut et des bandes de corbeaux qui s'envolaient désespérément après Disparaître Dans la direction de Port-Arthur

about

Un recueil de quatre vieilleries, composées entre 2016 et 2018 et remises en forme de manière spontanée cette année.

credits

released January 20, 2023

Tous les instruments, mix et mastering par Gabriel Kröger
Voix sur "La Prose du Transsibérien" par Marie-Lys
Texte de "La Prose du Transsibérien" par Blaise Cendrars

Pochettes par Christopher Gaudin

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